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  • Photo du rédacteurBenoit Dumaine

Gouvernance / Le design de la Perception-Action® ou l'art de "s'entreprendre"

Dernière mise à jour : 13 févr. 2020

S’agissant du chef d’entreprise, le sentiment de solitude est inhérent à sa posture d’homme/femme chef d’orchestre. Il cherchera d’autant à bien s’entourer.

S’agissant du conseil d’administration, entreprendre se conjugue au pluriel.

Alternativement individuel et collectif, le pilotage s’inscrit dans l’acte de « s’entre-prendre ».

 

"L'auteure Françoise Dumaine a constitué une réseau de professionnels, managers, dirigeants, chefs d’entreprise et a animé une série de séminaires dans un tiers-lieu aménagé à cet effet dans un havre de paix au fond d'un jardin atypique de région parisienne. Les huit ateliers proposés, environ une fois par mois, ont dessiné un parcours. Ils ont été ponctués de conférences dans d'autres cadres au sein d’institutions financières ou de collectivités territoriales. L’auteure s'est alliée à un DRH de renom attentif aux questions de management humain. Après une longue carrière dans la finance,

elle a mis en œuvre le fruit de ses études en management et son talent de phénoménologue/sophrologue pour animer, faire vivre et mettre en débat-partage ces expériences vécues.

Ces professionnels sont ressortis riches d'une expérience à la fois intellectuelle, cognitive et sensitive, fortifiante tant individuellement que collectivement.

Les participants ont livré leurs commentaires sur cette démarche unique et transformante.

L'auteure évoque dans ce chapitre son vécu et son analyse de ce cheminement, alors qu’elle nourrit un projet d’entreprise. Les liens particuliers ainsi noués avec ces professionnels de compétences et de milieux variés sont constitutifs de la future gouvernance du projet en finance solidaire qu’elle porte. Elle nous en relate la genèse avec une grande sensibilité."

Hélène Sabatier

 

INTRODUCTION


Le sujet qui nous anime en cette fin d’ouvrage est celui d’entreprendre. S’agissant du chef d’entreprise, le sentiment de solitude est inhérent à sa posture d’homme/femme chef d’orchestre. Il cherchera d’autant à bien s’entourer. S’agissant du conseil d’administration, entreprendre se conjugue au pluriel. Alternativement individuel et collectif, le pilotage s’inscrit dans l’acte de « s’entre-prendre ». La relation particulière, qui se crée au sein de cette instance qu’est le conseil d’administration, se doit d’être une relation d’alliance. La réalisation de l’intérêt général de l’entreprise dépendra directement de la qualité de cette alliance. Si entreprendre ne s’apprend pas de façon normée, l’art lui concède le bénéfice de la comparaison. Pourtant les passages successifs de Start’Up à PME puis ETI marquent des étapes qui demandent d’organiser, former et structurer les différents étages de la croissance. La construction peut être rapide, parfois contrariée, mais souvent fragile. En consolidant la croissance, le génie du créateur peut-il être préservé et continuer à se transmettre dans l’impulsion première ? Comment intégrer la décision collective d’un conseil d’administration dont les membres se présentent comme les pièces d’une culture à créer ? Afin que le conseil d’administration tende à une forme d’unité et cohérence dans ses choix stratégiques, nous posons l’hypothèse que chacune de ses parties, et plus encore le chef d’entreprise lui-même, doit marquer un certain détachement. Ce passage, ou va-et-vient, entre l’homme clé et le conseil d’administration opère un entre-deux.Ainsi, entre alliance et détachement, devra se bricoler, se négocier, s’élaborer l’art de « s’entre-prendre ». Les disruptions, légion dans tous les pans de l’économie, nécessitent de cultiver cet entre-deux comme espace décalé garant d’une réalisation non normée et pourquoi pas hors norme, terreau de l’innovation. En latin disrupere signifie briser en morceaux, faire éclater. Il en va donc de la survie de l’entreprise. Opportunité ou risque, éclatement ou innovation ? L’équilibre est un art, peut-on le capturer et le cultiver ?

Ce sont ces éléments ambivalents que nous tenterons d’interroger dans cet article à travers une expérience vécue dans l’art de « s’entre-prendre ». Si un conseil d’administration est un corps social institutionnalisé, nous verrons en premier lieu à travers l’expérience « Territoire vivant, Entreprise vivante » comment une communauté ouverte et informelle peut préfigurer ce corps social organisé créateur d’un projet d’intérêt général. La dynamique en présence pourra nous éclairer dans un deuxième temps sur les conditions de sa mise en mouvement et de sa formation. Nous examinerons en troisième lieu en quoi l’expérience a dessiné l’articulation d’une méthode interdisciplinaire, le Design de la Perception-Actions®. Ce design tire sa singularité de l’ancrage que lui offre l’entreprise reconfigurée par l’avènement du numérique, à la recherche d’une nouvelle forme de proximité. De nouvelles perspectives à n’en point douter pour une gouvernance à la recherche de sa modernité. Nous poserons les repères de sa reconnaissance.



SOMMAIRE

Chapitre I : Territoire vivant, Entreprise vivante

a) Susciter l’art de « S’entre-prendre »

b) Vers la construction d’une appartenance collective

Chapitre II : Mise en mouvement et formation d’un projet d’intérêt général

a) Créateur, entrepreneur ou passeur de sens

b) Le Design de la Perception-Action® pour inverser la perspective

Chapitre III : Une nouvelle perspective pour une gouvernance avant-gardiste

a) De l’expérience à la méthode

b) Une reconnaissance dédiée pour une gouvernance performante

Conclusion


 

CHAPITRE I


« Territoires vivants-entreprises vivantes :

un rapport socio-économique revisité »


a) Susciter l’art de « s’entre-prendre »

« Territoires vivants, entreprises vivantes » se présentent comme une nouvelle figure de la Dimension Humaine à travers les Masters Class D’Humaine. C’est ici que se définit et s’expérimente l’art de « s’entre-prendre ». La définition du petit Robert indique « saisir, surprendre », « entre et prendre » ce qui suggère l’espace et la prise/la préhension manuelle. Nous sommes loin du lâcher prise. Toujours mobilisé, ne demandez pas à un chef d’entreprise de lâcher prise. En revanche, l’espace nous interpelle car il semble ouvrir une voie d’accès de l’entrepreneur à lui-même (Je) et aux autres (Nous) que sont associés, membres du conseil d’administration, collaborateurs, clients, partenaires….

Ces ateliers ont été conçus, créés et animés sur le constat d’une dissolution du lien social et de l’éclatement des temps dans l’entreprise. De par le profil des participants, ils ont pris une configuration territoriale, public-privé. Un tissu économique est territorial et diversifié par nature. Pour répondre au souci d’épuisement collectif, j’ai construit ces plans à partir du "Design de la Perception-Action®", élaboré chemin faisant. Dans le mouvement grandissant des entreprises libérées et du "Mouvement faire"[1], ce design particulier nourri de nouveaux liens sociaux, dessine une géographie nouvelle du rapport spatio-temporel comme espace d’appropriation et de « saisie » d’un objet d’intérêt général. Il situe l’individu au regard de son projet de vie. Ses sensations actualisées deviennent médiatrices avec les éléments extérieurs, sa perception affinée le renvoie à lui-même tout en nourrissant son rapport à l’altérité. Situé dans un cadre hors travail, au profit du travail, ces masters ont adopté une posture volontairement décalée, enrichie par la diversité des acteurs économiques qui les ont traversés.


b) Vers la construction d’une appartenance collective

Sur ce projet, j’ai eu la chance de faire une rencontre improbable : l’amiral Oliver Lajous,Ex DRH de la Marine Nationale, élu par ses pairs DRH de l’année 2012.Venant pour ma part du monde de la banque/finance, en transition dans les sciences sociales, la rencontre avec l’amiral fut inattendue, décisive. Notre passion de l’humain nous a réunis autour de l’ « Art de diriger ? »[2]. L’amiral nous éclaire sur ce que signifie « embarquer » dans les sciences du management. Il n’en fallait pas davantage pour proposer à Olivier de mettre en scène « L’art de diriger ? ». Les Master Class D’humaine avaient trouvé leur enracinement. Nous avions besoin d’un lieu intemporel, car la superposition des temps sociaux, privés et professionnels, suppose de repenser simultanément les frontières spatiales et temporelles. Nous disposions d’un tiers-lieu telle une « Hétérotopie comme des espace absolument autres», si chère à Michel Foucault[3]. La réussite de cette expérience a nécessité cette hybridation et la diversité des acteurs. Le tiers-lieu dédié à nos pratiques de « l’Art de diriger ? » et à l’articulation du Je et du Nous[4]a pu ouvrir un nouveau rapport à l’autre, source d’échanges, d’étonnements et de créativité.

Ainsi le témoignage de l’amiral Olivier Lajous :

« A l’image du genou, articulation clé du corps humain qui permet la mobilité, donc la liberté, la relation équilibrée entre les je et le nous est un véritable défi pour toutes les organisations. J’ai personnellement eu l’occasion de vivre d’inspirants moments de « je » vibrant à l’unisson au rythme du « nous » lors de Master class organisées par Françoise Dumaine. Tous les je présents étaient reliés au nous subtilement suggéré au fil de ces rencontres. Un pur bonheur ! »

Le travail se préfigure désormais en trois lieux: l’entreprise, le domicile et les espaces de proximité (co-working ou Fab Lab). J’ai proposé un entrainement « senso-perceptif », dédié à cette nouvelle géographie du travail. Ce vécu a généré chez les participants de nombreux phénomènes émergents, laissant nombre de personnes dans une forme d’étonnement, d’émerveillement d’elle-même.

Guy, cadre dirigeant d’une grande institution financière, témoigne :

" Plonger en soi

Se retrouver

Reprendre possession de son souffle.

Pour aller vers l'autre

et guider le projet.

On ressort rénové de la rencontre."

Et si cet entre-deux, c’était partir et revenir, se désengager pour mieux s’engager, selon l’expression de l’amiral Olivier Lajous. Pour Danièle, chef d’entreprise en communication, cela semble évident. "Au cours des ateliers, j’ai ressenti la puissance, le recul, la liberté de l’aigle en survol d’un immense territoire. Il en est resté prise de recul, précision de la vision, force et sérénité avec le sentiment à chaque fois de revenir d’une semaine de vacances joyeuse et dépaysante." Le temps subjectif comme ouverture au monde. Pour Sébastien, chercheur en sciences de l’information et de la communication, cela signifie :

« Sortir du temps pour regarder le monde autrement et envisager d’autres vécus possibles avec les autres ».

Pour Florence, manager de structures associatives et socio-médicales :

« Un temps suspendu aux effets durables, l’appropriation et l’investissement d’un temps pour soi en connexion avec les autres. Je suis plus performante ». Les expériences vécues témoignent de la force collaborative et d'une économie présentielle particulièrement dynamogène.

Pour Jean, Responsable RSE d’un grand établissement bancaire :

« L’entrainement au cours des ateliers nous propose de redécouvrir nos ressources internes et nos énergies intimes. Nous ressortons plus riches de sensations et plus fort d’avoir pu vivre ces moments en partage avec les autres participants ». L’occasion d’un lien social revisité.

Pour Dominique, responsable du dialogue social d’une entreprise du CAC40.

« Expression sonore avec effet brise-glace, risque corporel qui crée une forme d’indulgence, expérience par laquelle on accepte plus facilement les autres. » Dans ce contexte, le Design de la perception-action® est producteur d’un savoir nouveau.

Pour Cécile, journaliste, cela est évident :

« Françoise a le don de convoquer le temps de réflexion et l'observation des forces en présence…considérer ses propres talents parfois ignorés. Respirer, comprendre, faire la paix. J’ai pu trouver le chemin pour décider en pleine possession de mes moyens. » Oser repenser, expérimenter les frontières, de soi, du lien social. Voici le cœur même de l’innovation sociale que je défends.

Christian, associé-fondateur d’un grand groupe d’audit et d’expertise-comptable, m’encourage à continuer dans ce rôle de guidance :

« Ces ateliers m’ont « déformaté » : ressentir et découvrir des phénomènes nouveaux en soi sans qu’il soient commandés par la volonté, cela m’a permis de prendre davantage conscience de mes champs de possible, de prendre le temps d'explorer mon « ADN », ressentir ce que l'on est, sans jugement, une impression de commencer à se trouver vraiment… » La méthode expérimentée ouvre des espaces d’imagination, d’empathie et de bienveillance. Au fils de ces vécus, s’articulent les prérequis d’un nouveau « vivre ensemble », terreau de valeurs éthiques partagées.

Pour Irène, chargée de mission au Ministère du Travail cela fait sens :

« Confiance enrichie des voyages vers l’Intime, récits partagés et entendus dans une écoute mutuelle vibrante au plus près de nos justesses authentiques, tous ces dons nourrissent nos êtres en profondeur. »


CHAPITRE II

« Mise en mouvement et formation d’un projet entrepreneurial d’intérêt général »


a) Créateur, entrepreneur ou passeur de sens

Nous avons vu que l’entrainement proposé, construit sur huit ateliers « de la Discipline du Bonheur à l’Innovation », a produit du sens individuel et collectif. L’émergence successive de phénomènes perçus et ressentis est venue ancrer les structures pérennes de chacun (confiance, assise, sérénité, écoute de soi et de l’autre…). Cette expérience, dans sa dimension intersubjective et interrelationnelle, s’est proposée d’ouvrir un champ d’action nouveau grâce à la « force du sensible » objet d’étude dans notre mémoire de Master 2[5] : «Changements et restructurations : redonner sens au travail dans un contexte d’incertitude». Opérationnaliser les concepts relève du défi. Il en a fallu pour faire émerger la force du sensible, s’affranchir des stéréotypes du genre et la rendre accessible à la diversité des participants : comme capacité sensible chez ces messieurs et réalité d’une force vécue chez ces dames. Force cohésive à la périphérie de l’entreprise, elle est néanmoins constitutive de la relation d’appartenance à l’entreprise. Parce que l’on a retrouvé le goût de soi, le goût de l’autre, l’empathie et la fraternité revivifient les ressorts d’actions. Après 18 mois de cette expérience, les choses auraient pu en rester là. Elles sont justes restées latentes, en jachère. Une histoire est en train de s’écrire. Malgré sa vocation socio-économique, cette expérience unique faite d’émerveillement, d’enchantement, de joie et d’authenticité n’a pu trouver son modèle économique. Il lui fallait trouver un champ d’action car une force sans son champ d’application ne peut prendre sa forme : un objet de réalisation pour une force collaborative et cohésive en mouvement.


b) Le Design de la Perception-Action pour renverser la perspective

Forte de ce constat, je suis revenue dans mon métier premier, la gestion de patrimoine, avec l’idée de ne plus le pratiquer de la même manière. Je me suis alors « entre-prise » pour saisir ce que l’expérience m’avait enseigné : le patrimoine est avant tout humain. Je n’ai jamais eu autant de plaisir que celui de susciter émerveillement et étonnement…. Il fallait tout remettre à plat pour préserver ce plaisir, pour lui laisser la fraicheur du premier regard, comme si c’était la première fois, à chaque fois renouvelé. Comment créer la passerelle entre patrimoine financier et patrimoine humain ? Passant du doute au bricolage, de la tentative à la remise en question, de brique en brique, un nouveau modèle de finance solidaire est né de ma première intuition. Si l’action précède souvent la conscience, l’acte est venu signifier la vision. Le Design de la Perception-action si souvent enseigné lors des ateliers, s’est ici invité avec son potentiel créateur. Animatrice de communauté, j’ai reçu plus que je n’ai donné. La « force du sensible » qui s’est développée est venue parachever une énergie circulaire. La communauté me soutient dans ce projet…le mouvement initié a trouvé sa force dans l’authenticité et l’éthique pour venir s’appliquer dans un champ nouveau, celui d’une finance éthique, responsable. Les valeurs continuant à se répandre, se partager et circuler entre nous dans la bienveillance, le plaisir est sauvegardé. Si je suis porteuse de ce projet de par ma double expérience (patrimoine financier et patrimoine humain), j’ai le sentiment intime qu’il est le fruit de ce collectif. Parmi les personnes que vous avez pu lire ci-dessus, se trouvent mes futurs associés, administrateurs ou collaborateurs. Pour sortir de la jachère, il fallait donner forme à un projet, d’abord l’initier pour lui donner force ensuite. Seule, je ne pourrai jamais mener la double innovation, sociale et économique, que le projet semble promettre. Grâce aux compétences du groupe, il pourra ouvrir une dimension Tech et Data, plateforme d’intérêt collectif, en lien avec les besoins et les attentes du marché. Je vous propose ainsi un renversement de perspective.

Comment un groupe informel de personnes investies dans la société, réuni dans un lieu tiers, trouvant le plaisir du partage à travers un nouveau vivre ensemble, peut-il être le terreau d’un projet d’intérêt général économique et solidaire ? Comment faire du durable hors des murs de la matérialité et de la technologie au profit d’une économie numérique, robotisée, sans un prérequis d’hyper-compétences. Complexité oblige, Edgar Morin[6] nous apprend que l’homme est bio-psycho-social. Nous sommes sur le bon chemin. L’entreprise est devenue globale et systémique en « transition fulgurante » selon l’expression de Pierre Giorgini[7]. Sans un virage humain englobant la complexité, les ressources typifiantes que sont agilité, habilité, justesse et humilité ne seront au rendez-vous. Méta-cognition et méta-reconnaissance sont intimement liées pour répondre aux défis apprenants face à l’obligation de compétitivité. Dans l’art de « s’entre-prendre », nous avons expérimenté et nous faisons maintenant…Après avoir levé la jachère, croisé les compétences, donné l’envie de faire et de s’engager, la vraie question est celle de la mise en mouvement de la gouvernance issue de ce collectif.


CHAPITRE III

Une nouvelle perspective

pour une gouvernance avant-gardiste


a) De l’expérience à la méthode

Au-delà de la démarche, le Design de la perception-action apparaît comme une méthode. Si elle mobilise différentes sciences sociales, et notamment ergonomie cognitive, sociologie, clinique du travail, elle se déploie par une phénoménologie psycho-corporelle expérimentale. Se dessine ainsi un nouveau champ d’intervention pour l’émergence de compétences collectives, situées ex-ante ou ex-post de l’intérêt général de l’entreprise. Maurice Merleau-Ponty[8] propose une articulation : «la phénoménologie se laisse pratiquer et reconnaître comme manière ou comme style, elle existe comme mouvement, avant d’être parvenue à une entière conscience philosophique. À la fois poétique, esthétique, imaginatif, énergétique, intégrateur, ce design particulier permet le passage du latent au talent. Il vient lui donner sa forme. Face à ces forces vives, la question est celle de leur diversité et de l’appropriation par tout le corps social. Le conseil d’administration est missionné pour donner impulsion et mouvement. Un management humaniste, créateur de valeurs et de performance, peut-il se forger en son sein ? Nous allons voir en quoi le Design de la Perception-Action®, en tant que force instituante, va pouvoir introduire une nouvelle relation managériale transversale, à commencer par la gouvernance. Dans les environnements dématérialisés, ce design au service de l’innovation, va pouvoir redonner corps à l’objet social et lui apporter :

- sa forme là où elle s’est perdue au fil de la complexité et de l’urgence instantanée,

- sa direction comme vision stratégique

- sa beauté, via un esthétisme hors de tous préjugés

- son inspiration par enchantement et étonnement collectif

- la vivacité de son lien social au sein des nouveaux lieux de modernité

- et finalement sa reconnaissance

Il ne s’oppose pas à l’innovation technologique, bien au contraire, il l’épouse, il fait congruence. Dans l’immatériel, il lui apporte solidité, assise et durabilité, les composantes de la compétitivité. Nous avons pu constater à travers la situation vécue que l’activité signifiante permet la co-construction d’un parcours, potentiellement source d’innovation. L’incorporation de la culture et des valeurs de l’objet social est à expérimenter au sein des conseils d’administration en devenir ex-ante et établis ex-post. Éclairer le conseil d’administration afin qu’il vienne lui-même éclairer l’entreprise dans toutes ses dimensions, transmettre la culture de l’écoute, de la bienveillance. La qualité de vie et la production du sens comme force d’attractivité des jeunes et moins jeunes talents. Si la coordination des activités organisationnelles n’est pas du ressort du conseil d’administration, la coopération, l’alliance et la vision partagée entre administrateurs peut être un vrai sujet de professionnalisation. En tant qu’instance à visage humain, elle ne peut se priver de sa force sensible et créative au risque de ne pas assurer la survie de l’entreprise face à ses décisions stratégiques.


b) Une reconnaissance dédiée pour une gouvernance performante

Comme tout corps social, un conseil d’administration ne fait pas exception aux ressorts de la dimension humaine. Ce dispositif en devenir pour les conseils d’administration, est une opportunité pour faire reconnaître une participation sociale en voie de professionnalisation.

Retracer les signifiants, les mettre en visibilité, les asseoir, leur donner corps procure éclaircissement et transparence pour les membres des conseils mais également pour le chef d’entreprise, les actionnaires, dirigeants, collaborateurs et toutes autres parties prenantes devant lesquelles le conseil voit exposée sa responsabilité pénale. Si nous considérons le conseil d’administration comme une matrice réceptacle d’un pouvoir, est-il en possession de son pouvoir d’agir ? Il s’agit ici pour l’entreprise d’un double déplacement, un déplacement des regards mais également un déplacement physique, réel, conquérant pour une ouverture de nouveaux champs. Plutôt que de conduite du changement, ne peut-on parler d’adaptabilité choisie par intégration du nouveau ? L’espace et l’objectivation concourent à la construction de cette appartenance en mouvement de haut en bas de l’entreprise. Si la professionnalisation passe par la certification et la normalisation de la gouvernance, son corolaire est la construction de sa reconnaissance. Cette voie d’humanisation est une réponse face à la responsabilité croissante de cette instance. Risques et incertitudes créent de la résistance, c’est un fait humain, non une critique. Il vaut mieux les prévenir pour que nos conseils s’engagent et sachent relayer l’engagement au sein des instances de direction et du management. Sans cet engagement et sa reconnaissance, tous deux transversaux, l’entreprise a toute chance de se priver de ses sources d’efficience, donc de performance.


Conclusion


Au-delà du répertoire de compétences assigné au conseil, la gouvernance est aussi le fait du charisme des individus mais plus encore de celui du chef d’entreprise. L’article 225-51 du code du commerce précise que « Le président du conseil d’administration veille au bon fonctionnement des organes de la société et s’assure, en particulier, que les administrateurs sont en mesure de remplir leur mission. » En la matière, cela peut être la chance des ETI. Il faut la force charismatique d’un patron pour faire face à l’adversité. Le charisme serait dit-on garant aujourd’hui des entreprises libérées. Mais libérées de quoi ? Cela laisse entendre qu’il y a un feu intérieur qui demande à émerger de la collégialité. Charismatique s’oppose à autocratique. La réalité du premier est l’art de guider pour ouvrir la voie d’émergence du feu créateur. Les prises de décisions autonomes, dans les différents territoires de l’entreprise, seront nourries par la confiance ainsi insufflée.

Un patron charismatique est souvent avant-gardiste dans son management. Loin du lâcher la prise, c’est bien l’art de « s’entre-prendre » qui s’opère. Ce charisme est pour partie inné et acquis. Sa voie d’acquisition est une alchimie qui englobe le feu de l’intuition, la sensation des éléments, la perception sensible. Elle trouve sa synthèse dans l’intelligence de l’action. Face à la compétitivité, le défi à relever sera celui de cultiver cet art et de le transmettre dans toute la profondeur de l’entreprise. Dans « s’entre-prendre » il y a cette notion fondamentale : « faire sien ». Cette appropriation de nature intersubjective est un prérequis face à l’accélération du temps, la multiplication des obligations. Si le ressenti perçu des contraintes est propre à chacun, le sentiment d’appartenance est le fruit d’un processus continu et collectif d’acculturation.

Chef d’entreprise, conseil d’administration, et fédérations diverses les représentant, ont une responsabilité dans cette appropriation nouvelle d’une ère nouvelle dont on commence à percevoir l’ouverture.

[1] LALLEMENT Michel, L’âge du faire, Hacking, Travail, anarchie , Seuil, 2015, 441 p


[2] LAJOUS Olivier, L’art de diriger ? L’Harmattan, 2014, 158 p


[3] FOUCAULT Michel, Le corps utopique, les hétérotopies, Lignes, 2009, 61 p


[4] LAJOUS Olivier , L’art de l’équilibre, L’Harmattan, 2016, 143 p


[5] DUMAINE Françoise, ECHAVIDRE Chantal, Mémoire de Master 2, 2014, 86 p

Management Travail et Développement Social, sous la direction de Norbert ALTER,


[6] MORIN Edgar, Le paradigme perdu : la nature humaine, Points, 2016, 238 p


[7] GIORGINI Pierre, La transition fulgurante. Vers un bouleversement systémique du monde ?, Bayard, 2016, 403 p


[8] MERLEAU-PONTY Maurice, Phénoménologie de la perception, Gallimard, 2009, 537 p


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